Nous publions ci-après , un article de Chasse et Pêche paru dans le n° du 5 déc. 1897
" Le pigeon manotte
En rendant compte de l'exposition de carneaux à Uccle , nous avons parlé incidemment du
pigeon manotte, espérant en faire sous peu un pigeon d'exposition. Bien nous en a pris .
A Paris, nous avons eu, avec M. Paul Monseu , la chance de rencontrer M. La Perre de
Roo au moment où il essayait une paire de chevaux dans une des allées du Jardin d'
acclimatation. En même temps , nous avons vu M. Robert Fontaine, le grand amateur du
Nord , qui ne pouvait manquer d'assister à toutes les manifestations de l'élevage dans
le Nord , en Belgique ou à Paris. Naturellement , tout en examinant les chevaux , nous
avons eu un bout de conversation concernant les pigeons , et il en est résulté pour
nous la bonne fortune d 'avoir reçu la très intéressante lettre que nous nous hâtons
de reproduire en entier :
" Marcq , le 16 novembre 1897.
Mon cher Vander Snickt,
" Je rentre de Paris et , en lisant Chasse et Pêche , je remarque que vous parlez du
pigeon manotte. J'en ai retrouvé à peu près purs et tels qu'ils ont existé dans le Pas-de-
Calais. J'ai passé une quinzaine de jours à Aubigny ( P-d-C ) pour y chasser la perdrix
comme , du reste, je le fais tous les ans. Pendant mes moments de repos de chasse, je me
suis occupé à chercher des manottes.
.. J'ai visité tous les environs. et voici les
renseignements que j'ai obtenus :
"Les grandes fermes de 12 à 20 chevaux possèdent
des pigeonniers , tours ou greniers, contenant de 130 à 400 couples de bisets.
Anciennement , ces bisets étaient bleus, ou bleu écaillés ; depuis une quarantaine
d'années ces pigeons se sont croisés avec des pigeons voyageurs égarés et qui se logeaient
dans les pigeonniers à bisets et y restaient , d'où croisements. On voit , depuis ce
temps , des bisets rouges, rouges écaillés, cendrés, et ces mêmes couleurs panachées de
blanc. Ces pigeons ne sont nourris que quelques mois de l'hiver , le reste du temps,
ils se nourrissent. dans les champs. Ils produisent beaucoup , mais les jeunes sont
petits et se vendent fr. 0.80 à 1fr. le couple. Ces pigeons nichent dans des cases
fabriquées en terre glaise et qui se trouvent étagées tout autour du pigeonnier. Tous
les quinze jours, un marchand de pigeons vient chercher les jeunes et à chaque nid où il
en prend il racle le guano qu'il laisse tomber sur le sol du pigeonnier. Voilà pour le
biset.
" Les cultivateurs de moindre importance ont chez eux , au dessus d'une écurie ou d' une
vacherie de 6 à 10 couples tout au plus de pigeons manottes. Ces pigeons sont moins
sauvages ; ils ont pour nids des cases en bois comme celle-ci :
" Jamais plus de deux cases superposées. Ces cases se nomment des manottes , d'ou le nom
de pigeon de manotte, et , par abréviation, pigeon manotte. " Maintenant, reste la
question de savoir comment doit être ce pigeon. Mais avant, je dois vous dire que le
manotte est nourri à la ferme. Il va bien aux champs, mais ne saurait subsister comme le
biset. On le nourrit donc, et il est de la grosseur du voyageur. Les jeunes se vendent de
fr. 1.20 à fr. 1.50 le couple.
" Donc nous disons : grosseur du pigeon voyageur, fond
du plumage toujours blanc. Ce n'est donc pas le pigeon variété du carneau unicolore à
huppe dont vous parlez et que vous appelez manotte. Peut-être est-ce une espèce qui existe
dans la Somme , comme vous le pensez. En tout cas , ce n'est pas le manotte d'Artois. "
" Je continue : fond du plumage blanc avec des taches bleues. Ces taches sont par
plaques et ne sont pas des mouchetures. La tête et le cou sont presque toujours blancs ,
d'où l'œil noir ou œil de vesce. Les tarses sont nus. La huppe - ici arrive la diversion
d'opinion - doit être pointue suivant certains, et en coquille suivant d'autres ; mais cette coquille n'est pas large comme chez les frises milanais ou hirondelles boucliers : c'est une demi-coquille, si je puis m' exprimer ainsi.
" Pour moi , je crois que la huppe doit être pointue , car les plus beaux spécimens que j'ai vus l' avaient telle.
J'en ai choisi 8 couples et sur ces 8 couples , j'en ai choisi un couple blanc et noir , un
couple bleu et blanc et un couple bleu écaillé légèrement blanc.
II y aurait donc trois variétés :
l ° noir et blanc ;
2° bleu et blanc ;
3° bleu écaillé et blanc.
" Les autres couleurs n'existent pas, et s'il en existait des exemplaires, ce seraient des
croisés. J'espère que nous pourrons faire une exposition à Lille en janvier. Je les exposerai.
" veuillez agréer, etc.