Il était cependant nécessaire de faire ici l'historique de 100 ans de recherches
sur l'hérédité et sur les formidables progrès réalisés ces dernières années.
Il ne faudrait pourtant pas croire que l'hérédité a désormais livré tous ses
secrets. Un siècle après MENDEL, le code génétique est en voie de déchiffrement
et il semble que l'on n'ait plus grand chose à apprendre sur l'hérédité
chromosomique.
Mais une vieille question controversée revient à l'ordre du jour: existe-t-il un
second système héréditaire non chromosomique, échappant aux lois de MENDEL ?
Avant de clore ce chapitre, il nous faut cependant encore dire quelques mots de
l'hérédité des caractères acquis, surtout que certaines expériences intéressent
les aviculteurs.
Il y a quelques années, une vive controverse opposa les généticiens occidentaux
aux généticiens soviétiques de l'école de MITCHOURINE et LYSSENKO. Revenant aux
théories de LAMARCK, les Soviétiques affirmaient que les gènes n'étaient pas les
seuls supports de l'hérédité et que l'homme pouvait modifier celle-ci en
agissant sur le milieu externe et interne. MITCHOURINE fit ses expériences sur
des pommiers : il tenta vainement d'adapter des pommiers adultes au rude climat
russe, mais il obtint de meilleurs résultats avec de tout jeunes pommiers.
Certains d'entre eux s'adaptèrent parfaitement, et, qui plus est, transmirent
leur résistance à leur descendance.
LYSSENKO, lui, fit des expériences similaires sur le blé. MITCHOURINE croyait à
la plasticité d'un organisme jeune et pensait que, si on le soumet à des
modifications brutales de son milieu naturel, il réorganise son milieu intérieur
de manière à s’adapter et transmet cette organisation nouvelle à ses descendants.
MITCHOURINE et LYSSENKO conclurent donc à l'existence d'une hérédité cytoplasmique
qui, du moins chez les plantes, n'est plus guère contestée aujourd'hui.
Mais poussant plus loin, ils voulurent en déduire la possibilité de modifier
toute hérédité par l'action sur le milieu. En 1957, le problème de l'hérédité
de l'acquis était reposé en termes plus sereins par les expériences du
professeur BENOIT sur les canards. Avec son assistant, le révérend père LEROY,
il injecta à des canards de la race PEKIN, âgés de huit jours de l' A. D. N.
provenant du sang et des testicules de canards de race KAHKI. Or, plusieurs
des canards PEKIN présentèrent des modifications les apparentant à la race
KHAKI notamment la coloration du bec et la forme de la tête. Ils furent
baptisés « canard Blanche- Neige ».
Les modifications étaient-elles inscrites dans le patrimoine héréditaire?
Oui, car près de 70% de leurs descendants furent également « Blanche-Neige» et,
depuis, les caractères nouveaux se transmettent régulièrement à toutes les
générations. Une race nouvelle est bien née. Malheureusement l'expérience n'a
jamais pu être renouvelée. Le professeur BENOIT et son équipe ont vainement
essayé, à plusieurs reprises, d'injecter de l' A. D. N. aux canards PEKIN ;
aucune modification ne se produisit.
SI BIEN QUE LES SCEPTIQUES... RESTENT SCEPTIQUES. Depuis le père LEROY a tenté
une autre expérience: il a injecté du sang de pintade à des poussins nouveau-nés
de la race RHODE-ISLAND-RED. Or, il a obtenu chez un certain nombre de
descendants, à la première et à la seconde génération, des plumages aux
reflets bleu métallique, ainsi qu'une légère diminution de la taille.
A la troisième génération, le plumage vira vers le noir.
Les résultats de ses expériences ne sont pas contestables. Mais, leurs auteurs
eux-mêmes se gardent d'en tirer trop de conclusions. Car, on ne sait pas encore
très précisément quels mécanismes interviennent dans ces modifications
héréditaires provoquées.
L'expérience de trois jeunes savants américains sur des planaires n'ont pas non
plus prouvé que des modifications se transmettent aux générations futures.
Aucune preuve décisive n'ayant encore été fournie, partisans et adversaires de
l'hérédité de l'acquis restent sur leurs positions. Sur ce problème, comme sur
celui de l'hérédité cytoplasmique, auquel il est relié, la génétique n'a pas
encore dit son dernier mot.
D'après Jean Rostand, on est encore loin de
contrôler le code génétique, mais il pense qu'on y arrivera.
Toujours d'après Jean Rostand, l'homme modifiera un jour ou l'autre le code
génétique, mais on ne voit encore guère comment il fera.
La transplantation de noyaux est possible aujourd’hui, la modification du code
génétique sera peut-être pour demain !
les hommes voudront-ils et devront-ils en faire usage ?